Pourquoi a velo?

le pourquoi du comment de mon changement de statut de marcheur vers cycliste, Chine part 4

Je suis arrive a Hotan dans le sud ouest du desert du Taklamakan a pieds et j’en suis reparti a velo. La suite de mon voyage en Chine, je la ferais a bicyclette et non plus a pieds pour la premiere fois depuis plus de 2 ans. J’ai pris cette decision lors des jours precedents mon arrivee a Hotan, et je vais tacher d’en expliquer les raisons.

La premiere, et de loin la plus importante, concernait le probleme du visa chinois. Quand j’avais obtenu mon visa chinois touriste a Tashkent, en Ouzbekistan, debut avril 2010 tout semblait facile: je devais pouvoir etendre mon temps de sejour 2 fois d’affilee jusqu’a 6 mois maximum cumule puis faire un aller retour express a Hong Kong pour obtenir un nouveau visa de 6 mois voire 1 ans car la place etait reputee pour la facilite de la chose. Mais en cette fin de printemps, les autorites chinoises avaient decide de changer les regles du jeu et de durcir considerablement les conditions d’obtention de visas. J’apprenais a Kashgar, apres 1 mois et demi sans acces a internet qu’’il etait desormais necessaire de fournir des documents comme des attestations d’assurance, des justificatifs d’entree et de sortie du territoire genre tickets d’avion, des reservations d’hotel sur tout le parcours dans le pays (a fournir egalement) et, cerise sur le gateau, les 3 dernieres fiches de salaires ! Tout ca pour esperer obtenir un mois maximum de visa touriste. Une sorte de crise diplomatique franco-chinoise rendait la chose encore plus difficile pour les citoyens francais … les forums internet regorgaient de temoignages de francais coinces a Hong Kong dans l’impossibilite de demander un visa chinois. Dans mon cas, j’avais un visa de 2 mois que je pouvais etendre a deux reprises d’un mois chaque. Ca me laissait en tout et pour tout 4 mois pour traverser la Chine et rejoindre le Laos ou le Vietnam, un peu court forcement. Les 2 autres options qui se presentaient a moi etaient soit de rejoindre le Pakistan ou le Nepal. Dans un cas comme dans l’autre, j’allais m’attirer plus de complications qu’autre chose. Pour le Pakistan, cela commencait avec 400km de no man’s land entre les 2 pays impossible a parcourir autrement qu’en voiture (meme pour les cyclistes) puis ensuite avec la route des Karakorams desormais coupee par un immense lac cote pakistanais. Un glacier s’etait effondre quelques temps auparavant et un enorme lac s’etait forme dans la vallee, et seuls des helicopteres faisait la jonction nord sud. Ajoutez a cela que le Pakistan restait une destination risquee a traverser a pied a cause des fondamentalistes islamistes, et que l’Inde, le pays suivant, etait en quelque sorte un cul de sac a cause de sa frontiere fermee avec la Birmanie … Pour ce qui etait de rejoindre le Nepal, l’affaire etait potentielement faisable en 4 mois avec une cadence infernale mais pour cela il fallait entrer au Tibet. Traverser le Tibet a pieds releve de l’exploit, non seulement sur le plan sportif … mais surtout administratif. Pour commencer il faut un permis tres couteux pour acceder au Tibet puis plein de permis specifiques pour chaque sous-prefecture sur le trajet. Ensuite il faut savoir que pour evoluer librement en dehors de l’axe majeur Gomud-Lhassa-Khatmandu il est necessaire d’etre accompagne sur toute la duree par un guide accredite, a vos frais cela va sans dire, et qui de toutes facons vous empechera de vagabonder (en gros c’est taxi et hotels …). Bien entendu il est possible de tenter de frauder tout cela mais le risque est considerable si on se fait chopper (surtout si on est francais!). Esquiver les checks-points je sais faire, mais il y a toujours le facteur malchance et bien entendu le risque de delation (ma longue experience en la matiere en Ouzbekistan, Tadjikistan et en au Xinjiang m’incitait a la prudence). De toutes facons, aller au Nepal ne reglait rien si je n’avais plus la possibilite de revenir en Chine et l’Inde devenait la seule alternative bancale.

Bref si je ne voulais pas finir le cul pose dans une bagnole a regarder derriere les vitres defiler le paysage, il ne me restait plus qu’a trouver un velo pour finir ma traversee de la Chine. Cette alternative ne m’enchantait guere, on n’abandonne pas comme ca son mode de voyage fetiche, celui la meme pour lequel j’avais decide d’abandonner mon ancienne vie pour consacrer la nouvelle a un tour du monde a pied. Quelque part je pense que cette solution reste acceptable si on considere que je continue a voyager “by fair means”, par mes propres moyens et a la seule energie de mes vielles guiboles et de ma volonte.
Pour etre honnete, j’ajouterais egalement que ces 2 dernieres semaines de marche entre Kashgar et Hotan m’avaient litteralement lessive. J’etais presque arrive a la limite de l’epuisement physique a marcher quotidiennement 35km avec pres de 35 kg sur le dos dans ce foutu desert. Depuis que j’avais quitte l’Iran, j’etais devenu pour ainsi dire “gaule comme un somalien” et je ne pesais plus qu’a peine 65 kg. Les enormes quantites d’eau necessaire a ma survie dans ce chaudron infernal me lestaient le sac de plus de 10 kg supplementaires et j’en souffrais enormement. J’etais physiquement affaibli au point de ne plus pouvoir faire plus d’une heure de marche sans m’affaler une bonne demi-heure pour recuperer. Il n’y avait guere plus que ma volonte et mon entetement legendaire pour me faire avancer tout les jours … Si en plus j’avais des problemes a gerer mes visas, la volonte ne suffisait plus.
Passe Hotan, les zones desertiques et completement vides du Taklamakan allaient regulierement et progressivement s’etirer sur pres de150km consecutifs et puis ensuite ce serait les hauts plateaux tout aussi arides et inhabites (et salees qui plus est) du Qinghai qui m’attendaient. La gestion de l'eau allait devenir tres compliquee pour un marcheur ! La parade aurait ete de trainer un chariot derriere moi dans lequel j'aurais pu stocker des jerricanes d'eau, a la maniere de Bernard Olivier. Malheureusement il etait impossible de trouver ce genre d'équipement sur place, et sans doute difficile de trouver des pieces pour en fabriquer un sans y passer une semaine. A part faucher un caddy de supermarche je vois pas ! Marcher le long de la route et demander de l'eau au conducteurs de bagnole aurait pu etre une solution j'imagine. Mais dans ce cas j'y aurais consacre mes journees car les chauffeurs ne trimballaient generalement qu'une ou deux bouteille de 50cl . Dans les voitures climatisees, les gens n'ont pas soif meme en plein desert, et puis de toutes facon les commerces ne vendaient que des bouteilles de ce gabarit minuscule. Mais il etait hors de queston que je procede de cette maniere car j'ai horreur de faire la manche, j'aime me demmerder seul, c'est une constante dans mon voyage en solo. Avec le velo, je pouvais charger de grandes quantites d'eau et parcourir de bien plus grandes distances, ca semblait tout a fait gerable de cette maniere.

J'ai fait ainsi l'acquisition d'un vtt en acier de marque Merida (made in Taiwan) aupres de la seule vraie boutique de velos d'Hotan sur lequel j'ai adapte une large planche en bois sur le porte bagage arriere. De cette maniere je pouvais placer mon sac a dos sur la largeur et entreposer plein de grosses bouteilles dans les tendeurs. J'ai mis aussi une sorte de gros panier sur l'avant pour y deposer un autre sac plus petit ou je pouvais mettre un peu plus d'une dizaine de kilos, le velo ne pouvait pas se cabrer et je soulageais en partie l'arriere deja tres charge. Le velo a lui tout seul depassait 25 kg, auquel il fallait ajouter le poids de la planche (4-5 kg environ) et les outils et pieces de rechange (pres de 2 kg). Avec mon sac de 20 kg, 5 kg de bouffe, pres de 15 L d'eau et enfin bibi j'etais particulierement lourd mais completement apte a affronter de longues distances en toute sereinite. Avec les outils et quelques pieces detachees j'ai du debourser quelque chose comme 120 Euros pour ce velo, c'etait presque la moitie du prix d'une paire de mes chaussures de marche ! Les modeles en aluminium plus leger les moins chers valaient un peu plus de 200 E tandis que le clou de base chinois a une vitesse etait a 50 E, j'avais donc fait le meilleur compromis prix/utilite. De toutes facon ce n'etait pasun investissement a tres long terme …
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