Dernier mois d'hivers

Premiers veritables hauts reliefs en turquie orientale, mars 2009 (Toutenmarchant)
A partir d'Erzincan il nous restait pas mal de difficultés a franchir pour rejoindre la Georgie. Nous étions début Mars et nos visas arrivaient a leur échéance a la fin du mois. Il nous faudrait sans doutes réitérer la manoeuvre effectuée fin Décembre, a savoir sortir du territoire Turc vers un pays voisin sans visa, pour revenir ensuite finir le tronçon inachevé. Pour le moment nous continuions notre progression en direction du nord est. Un autre impératif également, nous imposait de nous rendre a Erzurum pour rencontrer nos anciens partenaires des débuts et d'effectuer une assemblée générale pour clore notre aventure commune. Dans un premier temps, nous allions évoluer dans la plaine d'Erzincan pendant deux jours afin de nous rapprocher de la gare de Tanyeri a partir de laquelle nous allions effectuer l'aller retour pour Erzurum. Ce sera notre première et unique expérience du train en Turquie, ces fameux trains que nous avions côtoyer maintes et maintes fois lors des semaines précédentes en marchant le long de la voie ferrée. A notre retour d'Erzurum trois jours plus tard, nous retrouvâmes le village de Tanyeri ou nous eûmes la chance de visiter une des rares Cemevi, a la fois salle de réunion et lieux de culte hebdomadaire des musulmans alevis de turquie. Le bled de Tanyeri marquait également pour quelques kilomètres la limite entre le secteur orange et la fameuse zone rouge d'où les activistes du PKK pouvaient frapper. Cote kurde rien a signaler, mais les militaires du coin semblaient en alerte permanente: la caserne de gendarmerie de Tanyeri ressemblait a une forteresse avec ses clôtures barbelées et ses sacs de sable empilés, sans parler des blindes légers et des tanks (!) qui stationnaient dans la cour. D'ailleurs nos amis les gendarmes nous gratifieront d'un double contrôle d'identité a trois jours d'intervalle ainsi que d'un questionnement en règle et d'un visionnage de la cassette de notre caméra ... allez savoir pourquoi, peut être qu'ils craignaient que l'on ai des prises de vues de leur base, ou quelque chose dans le genre !

Pour éviter de se retrouver harcelés par les militaires mais aussi d'évoluer dans une vallée principalement empruntée par une grande route nationale, nous partîmes dans un massif au nord ou l'enneigement semblait néanmoins important. Question tranquillité, nous allions être servis :désormais de vastes pentes enneigées se dressaient devant nous et la plupart des villages que nous croisions étaient presque déserts. Leurs habitants, des Alevis d'Istanbul ou d'Ankara, ne venaient y habiter qu'en ete. Seul le muhtar du village résidait en permanence. Mais lorsque nous commençâmes a prendre de l'altitude, les pistes n'étaient plus déneigées et les villages que nous trouvions sur notre passage étaient totalement inhabités. Heureusement nous pouvions compter sur les anciennes écoles, seuls bâtiments ouverts, pour trouver refuge pour la nuit. Ce fut le cas dans le village de Cayiryazi, ou nous dûmes préalablement dégager pas moins de deux mètres de neiges pour accéder a la porte ! Depuis quelques jours déjà la météo était particulièrement exécrable, et progresser a la fois sur des pentes ardues et dans une neige globalement détrempée relevait par moment de l'épreuve. Tandis que nous avions grimpe aux environs de 2200 mètres d'altitude, et considérant le manque de visibilité a plus ou moins court terme ainsi que les risque potentiels d'avalanche, nous dûmes nous résoudre a redescendre pour progresser désormais principalement vers l'est. Comme une récompense de nos efforts des jours passes, le soir même le maire alevi du village d'essenyurt nous offrit l'hospitalité dans une ambiance particulièrement conviviale. A titre d'anecdote, il nous raconta qu'il avait déjà accueilli quatre ans plus tôt des cyclistes espagnols qui voyageaient vers la Chine. Le jour suivant nous rejoindrons la vallée que nous avions quitte quelques jours plus tôt, mais désormais hors de la zone rouge, pour la quitter aussitôt direction un autre massif moins élevé et plus court que le précèdent. Entre temps nous traversâmes trois communes (Kargin, Mercan et Cadirkaya) alors en pleine effervescence politique.

Des élections municipales avaient lieu fin Mars dans tout le pays et la campagne électorale, pourtant déjà omniprésente depuis un mois dans les médias, battait son plein. Tous les villages arboraient des fanions et des banderoles en quantités hallucinantes aux couleurs des partis politiques concourant pour l'élection. Encore plus insolite et bien plus pénible: des autobus et des pick-ups équipés de sonos qui braillaient a travers les villages leurs slogans en musique toute la journée, mais aussi des colleurs d'affiche casse-couilles qui voulaient a tous prix poser leur tracts sur nos sac-a-dos ! Nous retrouvâmes brièvement, une dernière fois, la voie ferrée ainsi que des villages alevis avant d'affronter les dernières chaînes montagneuses qui nous séparaient de la grande vallée de la Coruh nehri. C'est aussi a ce moment que nous fumes séparés de Thierry, tandis qu'il prenait un raccourci pour éviter une piste. Nous le retrouverons cinq jours plus tard a Ispir. Malgré une altitude souvent proche des 2000 mètres, nous allions trouver beaucoup de villages peuples dans ce massif et pouvoir avancer sur des pistes suffisamment déneigées pour progresser aisément. La principale difficulté nous allions la rencontrer dans la dernière crête nous séparant d'Ispir: une ascension interminable et presque a jeun, vers un col a 2700 mètres, heureusement par un temps magnifique. Le soleil allait transformer une neige partiellement gelée dans la matinée en une véritable soupe ou l'on s'enfonçait régulièrement jusqu'à la taille. Cerise sur le gâteau, le col nous réservait une ultime difficulté, a savoir une immense congère de plus de quinze mètres de haut, infranchissable. Au prix de quelques efforts supplémentaires, nous contournâmes cet obstacle avant de descendre tout schuss mille mètres plus bas dans une petite vallée boisée bien plus accueillante. D'Ispir, et a nouveau a trois, nous évoluerions a présent dans la vallée qui nous mènera a Yusufeli cinq jours plus tard. Nous progressions cette fois-ci sur une route, mais fort peu fréquentée, tout d'abord dans une magnifique gorge avant de rejoindre une vallée plus large ou trônaient, a intervalles réguliers, de magnifiques forteresses géorgiennes plus ou moins bien conservées. A l'exception des deux premiers jours ou nous marchâmes sur une pluie battante, nous allions désormais profiter d'un soleil printanier pour nous rendre a Yusufeli. Une fois sur place il nous fallait filer en bus vers la Georgie pour renouveler notre permis de séjour une dernière fois.

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