Tourisme humanitaire

ma visite d'un orphelinat avant de faire un tour sur le littoral, Cambodge part 2 Phnom Penh - Phnom Penh 02.11 - 12.11.2010

Avec 1 mois de visa pour un pays relativement petit comme le Cambodge j'avais pas mal de marge de manoeuvre avant de rejoindre la Thailande. En fait j'avais 2 idees en tete: premierement descendre vers le sud faire un tour sur le littoral pour voir la mer (la vraie quoi, parceque la Caspienne et la mer Noire depuis 2 ans c'etait pas terrible) mais aussi peut etre bien faire du volontariat aupres d'une des innombrables ONG presentes au Cambodge. A vrai dire j'etais seduit par l'idee de faire pour la premiere fois quelque chose d'utile surtout dans un pays aussi meurtri que le cambodge mais aussi par la perspective de rester enfin suffisement longtemps a un endroit pour commencer a travailler pour mon site internet. Tandis que j'etais a Phnom Penh, Samnang, le directeur d'un orphelinat, m'avait contacte via le reseau Couchsurfing. Il m'avait invite a visiter son orphelinat et a y passer quelque temps. Son ecole etant situee dans la province de Takeo, au sud de Phnom Penh et sur ma route pour rejoindre le littoral, je lui confirmais ma venue imminente. Le soir meme de mon depart de la capitale j'arrivais sur place, non sans difficultes car l'orphelinat etait dans un bled minuscule paume au milieu des rizieres et loin de tout. Samnang n'etait pas la car il travaillait a Phnom Penh et ne venait que les week ends, c'etait son adjoint Chorn qui m'accueillait. Ce dernier, comme la plupart des instituteurs  de l'ecole, etait anglophone et vivait dans l'etablissement. Ils enseignaient tous l'anglais et parfois d'autres disciplines comme les mathematiques ou d'autres langues et a leur contact j'en apprenais un peu plus sur l'orphelinat, ses pensionnaires et son fonctionnement.

Les enfants pour commencer etaient ages entre 8 et 14 ans (ils fesaient tous moins que leur age) et venaient d'horrizons differents: il y avait de vrais orphelins, des enfants dont les parents etaient parti travailler a l'etranger, d'autres dont les parents etaient malades (le plus souvent atteints du Sida) et aussi des gosses qui avaient ete victimes de sevices sexuels ou tires des griffes de la prostitution de Phnom Penh. Les enfants partaient le matin a l'ecole publique du village et revenaient l'apres midi avec d'autres gosses du bled pour apprendre l'anglais dans les classes de l'orphelinat. Les instits etaient des jeunes khmers de 20 a 23 ans qui enseignaient benevolement mais en contrepartie etaient nourris et loges a l'ecole et Samnang leur financait partielement leurs etudes a l'universite car comme la plupart des cambodgiens ils n'en avaient pas les moyens. En restant 2 jours a l'ecole, je constatais que meme globalement demunis les enfants vivaient decement et ne semblaient pas malheureux dans l'orphelinat. Je me rendais compte que j'etais surtout inutile pour eux. Car en effet ce dont avaient surtout besoin ces gamins c'etait des gens qui s'interessent a eux et les occupent en jouant avec. Un peu d'amour et de distraction quoi. Les 2 nounous de l'ecole, une femme et son jeune frere, semblaient blases et collaient systematiquement les momes devant la tv pour regarder des dvd ou des programmes musicaux. Malheureusement, avec la barriere de la langue (les enfants ne maitrisaient que quelques rudiments d'anglais) et le fait que je ne suis pas particulierement pedagogue, ma contribution se limitait a jouer une partie de foot quelques mn. Je quittais l'orphelinat en promettant neanmoins de rencontrer Samnang a mon retour a Phnom Penh et de lui faire un don.

Je repartais ainsi vers le sud continuer ma petite boucle en prennant soin de freiner l'allure. C'etait d'autant plus tentant qu'il y avait regulierement des petites collines boisees dans la plaine qui m'offraient la possibilite de bivouaquer au sec, loin des rizieres inondees, et surtout a l'abri des regards indiscrets, luxe inestimable dans ces secteurs surpeuples de villageois curieux et pots de colle. Je ne pouvais pas vraiment m'enfoncer trop loin dans les sous bois a cause des mines antipersonnel (il y en a partout au Cambodge, en particulier dans les forets) mais suffisement pour etre planque. Passe Kampot, je gagnais le littoral. Je ne regrettais pas mon choix car la region etait plutot agreable a traverser: il y avait la mer d'un cote et aussi desormais de vrais reliefs avec les premiers massifs de la chaine montagneuse de l'Elephant qui occupe une bonne partie du sud ouest du pays. La route restait a l'ecart du bords de mer, a environ 2 km en retrait, mais il etait possible de rejoindre les plages via quelques petites pistes sableuses de pecheurs. Comme souvent, le temps tournait a l'orage et je ne m'attardais pas sur la plage et devais meme retourner jusqu'aux premieres pentes et depasser les mangroves innondees et infestees de moustiques du coin pour bivouaquer. C'est aussi ce jour la que choisit mon appareil photo numerique pour tomber en panne. En fait, exactement le meme probleme que j'avais fait depanner a Golmud 4 mois plus tot en Chine, a savoir l'objectif telescopique qui refusait de sortir. Il s'agissait sans doute d'un ressort pete a l'interieur et je me demandais si le margoulin qui  m'avait fait la reparation ne m'avait pas recycle l'ancien ... Le retour vers Phnom Penh fut beaucoup plus anecdotique meme si les 100 premiers km n'etaient pas si desagreables question paysages avec pas mal de reliefs boises dans un secteur peu peuple. Le principal probleme venait de la route N4: elle reliait la capitale a l'unique port du pays, Sianoukville et le trafic de poids lourds etait particulierement important. La route n'etait pas particulierement large et les routiers n'avaient manifestement que peu de considerations pour la securite des 2 roues. Car j'avais oublie de le preciser mais le Cambodge n'etait pas particulierement un paradis pour cyclistes. Meme si le trafic est plutot leger car tres peu de personnes possede une voiture, les routiers et les bus sont plutot dangereux a rouler toujours a bloc et preferent user leur klaxon que leurs freins ! Ca me changeait apres la la parenthese de calme au Laos.

De retour a Phnom Penh, je rencontrais enfin Samnang. Il souhaitait que je fasse du volontariat pour contacter des organisations francophones afin de l'aider a financer son ecole. Pendant mon court sejour a l'orphelinat j'avais file un coup de main a Chorn dans sa redaction (en anglais) de ses nombreux mails et manifestement ils en avaient deduit que j'etais doue pour la "communication" ! Je n'etais pas contre mais il y avait un detail qui me chiffonait. Il etait question que je loge chez une famille du village de l'orphelinat moyennant 5$ par jour pour le gite et le couvert. Je savais que Samnang gerait une petite agence de tourisme, en plus de son activite de directeur de l'orphelinat, qui proposait comme la plupart des officines de ce genre ... des sejours d'immersion chez l'autochtone a 5$ par jour ! Il faut etre clair: je ne doutais pas une seconde de l'honnetete de Samnang ni de son engagement desinterresse en faveur des enfants deherites du Cambodge, mais le melange des genres etait trop evident. Je savais bien que l'orphelinat ne recevait absolument aucune aide de l'etat cambodgien et je comprenais qu'il etait naturel qu'ils cherchent a profiter de la manne financiere du tourisme "hummanitaire" en vogue au Cambodge sans se soucier d'ethique. Mais moi je ne mangeais pas de ce pain la, surtout pour du volontariat. Je me resignais donc a repartir vers le nord-ouest et Angkor avant de gagner la Thailande. Je quittais la capitale sans avoir fait reparer mon appareil photo car personne n'acceptait de le faire pour moins de 25 $ (le quart du prix de l'APN !).
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