Vagabondage en saison seche

Mes deux premieres semaines dans le nord est de la Thailande, Thailande part1 Kbal Spean - Lomkao 22.12.2010 - 03.01.2011

De Kbal Spean a la frontiere thailandaise il y avait 100 km a effectuer  a travers la jungle minee du nord Cambodge. Pas de difficultes particulieres, c'etait plus ou moins plat mais je m'arretais le premier soir avant Anlong Veng au bout de 70 km pour ne pas trop forcer apres un si long arret. Ca fesait plus d'un an, depuis Tbilisi en Georgie  exactement, que je ne m'etais pas arrete aussi longtemps au meme endroit et il fallait que je me remette dans le bain. Je dois bien reconnaitre qu'a force de bouffer comme 4 et de rester colle devant le PC a enchainer les cloppes et les bieres j'avais pris facilement 5 kg et perdu pas mal de muscles aux jambes. Pour acceder au petit poste frontiere de Choam, il me fallu grimper une pente ultra raide sur pres de 5 km. L'effort fut assez violent et j'en avais vraiment chie, meme en poussant, surtout apres une si longue periode sans pedaler. Cet effort fut assez lourd de consequence car j'allais par la suite ressentir une douleur lancinante dans le genou droit qui allait mettre plus de 10 jours a se dissiper. Il me fallait serieusement freiner l'allure les prochains jours pour eviter l'inflammation.

Cela dit, avec 2 mois de visa en Thailande j'avais une raison supplementaire pour ne pas me presser. Passe les secteurs frontaliers je decouvrais le nord est de la Thailande ... qui ressemblait fortement a la Normandie (avec des palmiers) ! Plus question de forets vierges meme en arriere plan, ici le moindre hectare etait exploite. Mais contrairement au Cambodge, les rizieres n'avaient pas le monopole car il y avait aussi toutes sortes de plantations et d'etendues agricoles plutot variees. Ce n'etait pas particulierement passionant mais je passais neanmoins de bons moments a traverser ces contrees. La saison seche etait desormais bien entamee et il ne pleuvait plus, mais alors plus du tout. Le ciel etait bleu de jour comme de nuit et il y avait un petit vent frais du nord ouest qui rafraichissait les heures les plus chaudes de la journee. En soiree la temperature redescendait agreablement au point de devenir particulierement fraiche dans le courrant de la nuit. Un vrai bonheur. Il n'y avait pas encore si longtemps, je ne passais pas une nuit sans suer abondament tandis que maintenant il me fallait  ressortir mon duvet vers 1h du matin pour ne pas me les geler ! J'appreciais aussi de me balader dans le pays car les thais me fouttaient une paix royale. Plus personne pour me hurler des "hellos" toute les 10 secondes, j'avais droit juste a des saluts de la main. Fini les hordes de pots de colle et le stress de se faire reperer au moment du bivouac, quand je m'arretais le soir et que je posais ma moustiquaire (la tente etait devenue superflue) les gens qui m'appercevaient se contentaient de passer en saluant. Et surtout, plus de mines anti-personnel ! Je pouvais m'aventurer dans les sous bois sans craintes et beneficier d'une grande tranquilite dans un cadre agreable. J'appreciais tellement ce retour a la vie de vagabond que je n'avais pas envie d'arriver trop tot a Bangkok, surtout pour les fetes de fin d'annee. Je prennais la decision de faire un long detour par le nord du pays pour aller me frotter a quelques reliefs a proximite du Laos. L'etat du velo laissait a desirer: les roulements du pedalier etaient morts et l'axe avait morfle tandis que les dents des pignons de vitesse etaient completement bouffees et m'occasionnaient regulierement des sauts de chaine. Le velo grincait et couinait plus que jamais mais j'avais retrouve la forme et perdu quelques kilos donc tout allait pour le mieux. Evoluer en Thailande apres 3 mois passes au Laos et surtout au Cambodge, c'etait aussi quitter le tiers monde d'une certaine maniere. Les paysans, au nord est du pays notament, ne roullaient pas sur l'or loin de la, mais on sentait nettement la difference en comparaison des pays precedents. Il y avait enormement de  voitures individuelles sur les routes, des gros pick-ups climatises surtout, les commerces proposaient une tres large gamme de produits "made in Thailand" et les maisons d'habitation presentaient des criteres de confort proches de l'Europe. Le revers de la medaille en contrepartie concernait le cout de la vie. Les prix etaient bien plus eleves qu'au Cambodge, voire meme qu'au Laos. Aller manger dans un petit restaurant ou meme prendre un plat aupres d'un des innombrables vendeurs de nouilles ambulants etait impensable: il y avait tout juste de quoi se caler une dent creuse pour 2 a 3 fois le prix de ce que je mangeais en quantite suffisante en faisant mes achats dans les marches et les commerces. Il y avait peut etre plus de choix dans les epiceries mais au final je prennais toujours les memes produits pour me nourrir que dans les pays precedents: une petite boite de lait concentre sucre pour le matin, des nouilles chinoises crues avec des legumes et une petite boite de sardine a midi et quelques bananes le soir. De cette maniere j'arrivais a limiter la casse question depenses. Je constatais avec effroi que le prix des cigarettes etait horriblement cher, 2$ le paquet ! Heureusement j'avais fait le plein au cambodge en quittant le pays avec 2 cartouches ... qui m'avaient coute 3$ ! La Thailande etait surtout un pays hautement touristique: impossible de faire 10 km sur une route sans appercevoir un petit panneau bleu indiquant une "attraction" genre les chutes d'eau machin, le temple truc, le parc bidule ... etc . Le nord est du pays etait sans doute la region la moins touristique du pays mais malgre tout le moindre site d'un interet quelquonque etait signalise longtemps a l'avance, et l'endroit etait toujours cloture avec une seule entree a peage. Je fesais donc toujours l'impasse sur l'aspect "culturel" de mon voyage, j'avais peut etre fait une exception pour Angkor mais il etait hors de question de payer pour voir quoi que ce soit. Plus que jamais je me contentais du simple plaisir de vagabonder, ca au moins c'est gratuit !

En remontant vers le nord je longeais une petite chaine montagneuse et le paysage gagnait enfin en originalite. Il y avait souvent de longues portions forestieres a traverser et dans l'ensemble le secteur etait moins agricole. De temps en temps il ya avait quelques cretes rocheuses qui depassaient de la foret dense et pour le coup j'avais de nouveau l'impression d'evoluer dans un pays tropical ce qui n'etait presque plus le cas depuis la fontiere cambodgienne. Je ne prennais plus de photos depuis non plus, j'avais la flemme de triturer l'objectif en panne de mon appareil avec ma pince multiprise. A vrai dire mes journees se deroulaient paisiblement et sans accroc, il n'y avait guere que les problemes mecaniques du velo qui me causaient des soucis. Seul fait marquant pendant cette periode, je suis passe a 2 doigts d'un accident un peu particulier. Un soir, je pedalais lentement en scrutant le paysage sur ma gauche pour reperer un endroit potable ou squatter la nuit (j'avais oublie de le signaler mais en Thailande il faut rouler a gauche de la route). Quand subitement une roue avec un bout d'essieu tranchant passa en bondissant sur ma droite a quelques centimetres de moi avant de continuer sa course folle dans un champs. Je realisais tout juste se qui ce passais quand ce fut le tour d'une camionnette avec l'arriere gauche affaisse de me froler en me gratifiant d'un bruit assourdissant et d'une impressionante gerbe d'etincelles ! La vie tient a peu de chose ! Les accidents de la route c'etait forcement un risque potentiel en voyageant a velo car meme en etant prudent je n'etais pas a l'abri si un type perdait le controle de son vehicule. Pour avoir croise plusieurs poids lourds couches dans le bas cote sur les routes de Thailande (dont au moins 2 surcharges de cannes a sucre et c'etait la periode des recoltes) j'etais dorenavant plus que jamais conscient des risques !

Passe la ville de Loei, a moins de 50 km de la frontiere laotienne, je bifurquais vers le sud ouest et m'engageais dans un secteur montagneux pour quelques jours. C'est aussi exactement a ce moment la que mes pignons de vitesse ont pratiquement rendu l'ame. Cumule avec mon probleme de pedalier, il n'y avait guere plus qu'avec le grand plateau que ma chaine accrochait encore et ne sautait pas. L'ennui c'etait que la route grimpait pas mal par moment et surtout sur de longues distances. J'avais retrouve la forme et la douleur au genou etait passee donc je pouvais tout de meme pedaler en grand plateau dans les montees progressives ou quand il y avait des successions de montees et descentes. Mais dans les veritables ascensions de col je descendais pour pousser le velo. C'etait frustrant car avec le petit plateau j'aurais pu pedaler tranquillement, les routes thailandaises de montagne n'avaient tout de meme rien a voir avec celles du Laos ! Au moins je profitais plus longtemps du paysage. Ca ressemblait pas mal au Yunnan chinois en fait, sur la plupart des reliefs il y avait des plantations d'heveas a perte de vue et parfois quelques bannaneraies. Dans les secteurs sauvages je pouvais a nouveau boire l'eau des ruisseaux et ne plus recourir systematiquement a l'eau de pluie, car elle n'etait pas polluee par l'usage intensif des engrais et pesticides comme c'etait le cas dans les plaines. Passe 3 jours dans le massif je redescendais enfin en direction de la vallee du fleuve Pha Sak qui s'ecoulait vers Bangkok, 500 km plus loin. La route descendait presque eclusivement mais j'etais pourtant extenue. C'etait vraiment incomprehensible, je devais m'arreter quasiment tout les 20 km pour m'allonger et dormir 1 petite heure, ca ne m'etait jamais arrive auparavant. Le soir meme je dormais tres mal a cause de migraines et j'avais clairement de la fievre. Ca ressemblait enormement aux symptomes du paludisme. Apres tout j'avais passe plusieurs nuits a rediger sur un ordinateur en pleine jungle impaludee au Cambodge 2 semaines auparavant, et il m'etait bien entendu arrive de me faire piquer par des moustiques ! Je decidais de m'arreter au premier hopital sur ma route ...

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Commentaires

Ahh le nord de la Thaïlande ! Tu as vraiment dû prendre ton pied, surtout en cette saison où il pleut moins mais où, dans cette partie du pays, la température reste agréable.
j'ai visité de nombreuses fois la Thaïlande, mais j'avoue que ton récit me donne envie de la parcourir en vélo... Un jour peut être, je franchirai le pas (enfin, la pédale !).

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