Ecrit le vendredi 21 janvier 2011 à 14:02 par Sylvain.

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la grande vallee paisible

ma traversee de la vallee Alay a l'extreme sud du Kirghizistan, Kirghizistan part 1 Karamyk -> Sary Tash 23/05 -> 29/05/2010

J’etais donc entre au Kirghizistan, et pour la premiere fois depuis l’Iran dans un pays ou je n’aurais plus la pression en quittant le territoire a cause de reglementations a la mord moi le noeud que je m’etais escrime a frauder auparavant. J’avais un mois de visa mais je ne savais pas trop qu’en faire car la porte de sortie pour la Chine ne se trouvait qu’a moins de 2 semaines de marche. En fait je pensais aviser une fois rendu a Sary Tash, le bled carrefour de la vallee Alay, ou j’aurais le choix entre filer en Chine ou faire un crochet au centre du pays. En attendant, les “vacances” se poursuivaient, j’avancais tranquillement au gre de mes envies ou des caprices de la meteo. A vrai dire, en arrivant a Karamyk j’avais eu droit a un radical changement concernant a la fois le decors et les conditions climatiques. Car si cote tadjik la vallee de la Kyzyl Suu, la rivere rouge toujours boueuse, etait plutot escarpee, elle devenait vaste et plane cote kirghize jusqu’au premieres pentes du col d’Ikeshtam. La vallee Alay, de son vrai nom, etait une longue et large vallee glaciere a plus de 2500 m d’altitude, cernee au nord par une chaine montagneuse dont les sommets avoisinaient les 5000m d’altitude et au sud par l’immense massif comprenant les pics Lenine et communisme (il parait qu’ils ont ete renommes mais tout le monde les appelle encore ainsi) qui depassent largement les 7000m.

En cette fin de mois de mai, il n’y avait guere que le fond de la vallee qui n’etait pas enneige, meme sur les versants sud l’enneigement commencait a une cinquantaine de metres de grimpe. En ce qui concerne la meteo, la aussi plus rien a voir avec ce que j’avais connu au Tadjikistan. Fini les journees caniculaires qui se ponctuaient par des orages. Ici il faisait frais presque tout le temps malgre le soleil et le vent violent balayait tout sur son passage jour et nuit. J’avais le choix entre le vent d’ouest, frais et apportant la pluie et celui d’est, glacial et qui lui annoncait generalement des journees ensoleillees … ou de la neige. Pour faire un brin de toilette dans un cours d’eau, il fallait se motiver car d’une part l’eau des cours d’eau etait glacee et le vent etait impitoyable. C’est aussi pendant cette periode que la fermeture eclair de l’habitacle de ma tente a choisi de rendre l’ame. Je n’avais plus aucun probleme de ventilation la nuit avec les rafales de vent qui s’engouffraient dans ma tente ! A ce propos, j’ai tres vite appris les techniques qui me permettaient de monter et demonter ma tente avec un vent puissant sans quoi j’etais bon pour piquer un springt pour une bonne centaine de metres.

Avec les kirghizes j’ai eu droit a plusieurs changement par rapport au Tadjikistan.. Tout d’abord les kirghizes sont de la famille turco-mongole, un peu comme les ouzbeques mais avec la peau un peu plus foncee et les traits asiatiques plus marques en regle generale. Les kirghizes sont egalement musulmans mais bien moins pratiquants que leurs voisins tadjiques: il n’etait pas rare de croiser des filles en pantalon et aux cheveux courts tandis que les cigarettes et surtout la vodka semblaient avoir bien plus d’adeptes de ce cote ci de la frontiere. Pour ce que j’ai pu voir du Kirghizistan, du moins dans l’extreme sud du pays, je qualifierais les autochtones de peuple de cavaliers dans une tres large mesure. Les kirghizes sont de vrais cow-boys, en permanence juches sur leur monture, que ce soit les bergers, les agriculteurs ou qui que ce soit qui entreprend un deplacement ! Il est vrai que la tres large et herbeuse vallee de la Kyzyl Suu se prettait parfaitement a la pratique de l’equitation. En ce qui me concernait, je ne courrais plus le risque qu’on me prenne pour un afghan. Malgre ma barbe tres fournie, j’etais redevenu immanquablement un “tourist” aux yeux des autochtones bien plus habitues a rencontrer des occidentaux que leurs voisins immediat (quand bien meme la partie ouest de la vallee n’etait pas tres touristique). Tellement plus habitues aux touristes que j’avais eu droit a plusieurs tentatives de “racolage” par des habitants du genre: “viens chez moi, c’est confortable, on mange bien et c’est pas cher!”. Non merci, sans moi ce genre d’invitation … deja que mon credo etait de refuser les offres désintéressées.

Au Kirghizistan, je renouais egalement avec les interpellations massives des types curieux comme du temps de l’Ouzbekistan. Impossible de traverser un village sans me ramasser une bonne vingtaine de l’incontournable “Atkouda?” (t’es d’ou, en russe). Par contre dans une grande majorite j’avais affaire a des types un peu rustres, tout en premier degre pour ne pas dire un peu primitifs par moment (toujours dans la vallee en question, je ne peux pas juger pour le reste du pays). Tres, tres souvent j’avais des types qui me sautaient dessus pour me hurler leur “Atkouda” sans un bonjour ni reponse a mes salutations, toujours avec ce visage sans expression … deja que ca me saoulait en Ouzbekistan avec le sourire et l’expression amicale en plus ! Bref, comme j’etais en “vacances”, je limitais mes contacts avec mes semblables uniquement lorsque je traversais un bled pour me ravitailler en nourriture. Une bonne trentaine d’“Atkoudas” a l’heure avec le meme cortege de questions identiques a la virgule pres dans la foulee ca devenait tres vite deprimant autrement ! Autrement, quand les conditions climatiques n’etaient pas trop rudes, marcher dans la vallee etait plutot plaisant. Je passais le plus clair de mon temps a longer la riviere en foulant de l’herbe rase ou des petits galets avec en permanence un paysage somptueux en arriere plan. Bivouaquer tranquillemnt n’etait pas un probleme non plus, car bien que tres pastorale la vallee n’etait pas tres peuplee et il etait tres facile de trouver des endroits discrets pres de la riviere ou au pied des premieres pentes. Pas de flics, pas de bergers pots de colle, plus de rationnement alimentaire strict, pas de pression en ce qui concernait mon visa et enfin un cadre agreable: j’etais presque au paradis !

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