Ecrit le vendredi 25 février 2011 à 20:16 par Sylvain.

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L'enfer vert

ma traversee du nord Laos apres 4 mois passes en Chine, Laos part1 Boten - Vientiane 27.09 - 12.10.2010

Desormais je n'avais plus a courrir, fini la pression du visa couperet qui m'accompagnait depuis que j'avais quitte la Georgie debut decembre 2009. Au Laos, j'avais besoin d'un visa mais je pouvais l'obtenir a n'importe laquelle des frontieres du pays avec la Thailande voisine si besoin (aucun n'est requis pour un sejour de moins de 2 semaines). Et pourtant je continuais a velo. A vrai dire, si l'Asie du sud est etait un petit havre de paix  sur le plan consulaire, il n'en allait pas de meme pour l'Indonesie et son immense archipel. Plutot que devoir racheter un velo en Malaisie ou a Singapour autant garder le meme jusqu'en Australie. Ca fesait une sorte de continuite comme cela: je traversais l'Asie depuis la Chine a velo, voila tout. Dans ces conditions, j'envisageais de traverser le Laos du nord au sud jusqu'au Cambodge. En tenant compte de mes prouesses en Chine, traverser ce pays en 1 mois etait tres facilement realisable.

En attendant, il me fallait rejoindre la capitale Vientiane et traverser la tres montagneuse partie nord du pays dans la pure continuite du Yunnan chinois. Tout les cyclistes rencontres a Kunming m'avaient prevenu que ca n'allait pas etre de la tarte. Ils avaient bien raison !  Apres m'etre familiarise avec les routes du Laos, j'en venais meme a regretter la "nationale" 213 au Yunnan  pourtant bien defoncee et bien casse patte dans le genre montagnes russes. Pour un cycliste l'etat des routes est un aspect primordial dans le voyage et au nord du Laos il y avait de quoi se preoccuper. Pour commencer les 200 premiers km passe la frontiere chinoise etaient dans un triste etat, a savoir completement puis partielement niques. Je ne pouvais pas faire 100m sans etre secoue continuelement et j'etais condamne a garder les yeux rives sur le sol pour eviter le pire. Par la suite le revetement s'averait de bien meilleure facture mais il restait suffisamment de nids de poules pour rester vigilant en permanence. Mais le principal probleme venait de l'inclinaison des pentes dans ces routes de montagne: on frôlait la piste noire par moment ! Pas le moindre lacet, ici tout se montait et descendait d'un trait avec souvent des % enormes. J'ai passe des journees entieres a pousser le velo dans les montees, limite couche les bras tendus dans certains passages ultra raides, avant de regrimper sur ma monture pour zigzaguer entre les nids de poules en freinant a bloc continuellement dans les descentes ! En fin de cote la route etait systematiquement defoncee sur 5 a 10 m a cause du ravinement et j'etais oblige de m'arreter completement pour les aborder si je ne voulais pas plier une roue. Je n'avais plus qu'a descendre du velo pour pousser a nouveau dans la montee qui suivait aussi sec. Je ne pouvais meme pas profiter de l'elan de la descente pour entamer l'ascension !

Autant dire que j'ai eu pas mal de casse avec mon vieux clou pendant cette periode. En moyenne je petais un rayon de la roue arriere par jour, avec des journees fastes ou il m'arrivait d'en niquer 2 ou 3 (1h de reparation environ a chaque fois avec le dechargement et le rechargement du velo). J'avais egalement fume les patins de frein de la roue avant en un rien de temps au point de creuser des sillons dans le cadre de la roue. Autre bonne surprise, les secousses repetees avaient fini par detruire une des fixations au niveau d'une soudure du porte bagage sur le cadre du velo. Il m'avait fallu placer une bonne quantite de fil de fer pour que l'ensemble reste stable. Reparation sommaire mais definitive car toute nouvelle soudure etait impossible a cause de l'alliage du cadre. Enfin les dents du plateau intermediaire etait completement bouffee par l'usure et la chaine sautait si je forcais trop. Le bateau coulait normalement en somme ! Seul point positif, je n'avais plus de crevaisons car les routes etaient "propres", sans gravats d'avaries mecaniques de poids lourds laisses sur la chaussee comme en Chine.

Question climat, j'evoluais dans des conditions similaires au Yunnan, soit grosse chaleur saturee en humidite. Avec des temperatures plus elevees car l'altitude etait moindre d'une part et que je me dirigeais continuellement vers le sud. La saison des pluies etait presque terminee mais il subsistait toujours des courtes averses quotidiennes de 15 a 30 mn presque toutes les 2 ou 3 heures. Je n'arrivais toujours pas a m'acclimater et je ruisselais perpetuellement de sueur, meme au repos. La nuit par contre j'avais un peu de repit avec un peu de fraicheur. Dans les montagnes du moins car dans les zones a basse altitude pres du Mekong comme vers Luang Prabang ou les derniers 100 km avant Vientiane, les temperatures ne baissaient que tres peu pendant la nuit et je transpirais avec la meme regularite de jour comme de nuit. Au Laos, tout ou presque me depaysait de la Chine: dans le nord du pays les villageois vivaient le long de la route et presque toutes leurs activites ne s'en ecartaient guere plus de 200 m, en arriere plan tout etait sauvage. Ca me changeait des exploitations agricoles et des plantations a perte de vue du Yunnan. Il m'arrivait de traverser de longues  zones totalement vierges entre les villages, il suffisait simplement de quitter la route pour s'engager dans la foret tropicale. Enfin rarement plus de quelques metres car il etait  impossible de progresser a travers la vegetation hyper dense sans machette. Les laotiens contrastaient egalement avec les chinois: pour commencer, le premier truc qui m'avait frappe des le premier jour c'etait le nombre incalculable de gamins que je croisais. Ce n'etait pas vraiment un hazar car plus de la moitie de la population du pays avait moins de 15 ans. En Chine,avec leur politique de l'enfant unique je passais le plus clair de mon temps a croiser des vieux en grande majorite ! Au Laos les gosses etaient au taquet des qu'ils me voyaient: j'avais droit a des salves de "hello" ou "sabaydy" (le salut local) de toute part et beaucoup se placaient au bord de la route en tendant la main pour topper ! Les adultes quant a eux se demarquaient clairement de leurs voisins chinois par leur nonchalence. Tandis que les chinois debordaient d'activite du matin au soir, les villageois laotiens eux appreciaient manifestement d'avantage la sieste dans le hamac aux heures chaudes. L'autre constat flagrant concernait le niveau de vie. Les laotiens etaient bien plus pauvres que leurs voisins chinois (a l'exeption peut etre des ouighours et des tibetains) et la presence massive d'ONG dans chaque bourgade en temoignait.

Sur ma route j'ai aussi traverse des "Dysneyland" a touristes comme Luang Prabang ou Vang Vieng notamment ou il y avait une quantite phenomenale d'occidentaux au m2. Dans ces bleds, pres d'une barraque sur 2 etait une guest house ou une pension tandis que l'autre moitie etait des restaurants ou des agences touristiques ! Je ne me suis pas attarde dans ces tristes lieux ou le fric regnait en maitre absolu. Dans ces coins la, il y avait parfois des trucs assez insolites: dans la republique democratique du peuple du Laos a parti unique, on arbore partout cote a cote le drapeau du pays avec la banniere rouge ornee de la faucille et du marteau ... mais aussi quelque fois les symboles de l'imperialisme americain ! A Vang Vieng par exemple, tout les panneaux de signalisation sont doubles d'une enorme reclame pour Pepsi cola ! Au Laos je  decouvrais egalement avec angoisse un pays bien plus cher que la Chine et ou le tourisme etait considere comme une manne financiere primordiale. La moindre cascade ou lieu d'interet quelquonque etait precede d'un peage de 2 a 5 $ , c'etait assez deprimant a constater. Pour le coup, je ne me suis pas vraiment senti motive pour aller faire quelques excursions hors de l'axe principal ... L'autre inconvennient au Laos etait qu'il etait interdit de faire du camping sauvage. La loi oblige les etrangers a s'enregistrer chaque soir en dormant dans des hotels ou des pensions meme si les controles sont totalement inexistants. La discretion etait donc de rigueur pour dormir sous la tete. Dans les secteurs montagneux la chose etait plutot aisee, il suffisait d'attendre que les villageois rentrent chez euxen fin d'apres-midi pour squater tranquillement dans les bananeraies ou mieux sous les petits abris agricoles en bois. Dans les secteurs touristiques ou dans la plaine avant Vientiane par contre il me fallait ruser pour ne pas me faire reperer en attendant le dernier moment avant le coucher du soleil.

Arrive a Vientiane, j'avais 2 boulots: reparer au mieux le velo et prendre le visa de 2 mois pour la Thailande qui etait exeptionnellement gratuit a l'epoque (en grande partie a cause de la crise des "chemises rouges" et de la violente repression qui avait ensanglante Bangkok quelque mois plus tot). Pour obtenir le visa thai, je n'ai eu aucune difficulte par contre pas moyen de trouver la moindre boutique de cycles a Vientiane, cette capitale minuscule ou on ne trouvait au mieux que des loueurs de velos. Il me faudrait donc tenir jusqu'a Phnom Penh au Cambodge ou je pouvais esperer trouver des pieces de rechange, heureusement le trajet etait presque plat entre ! Pour conclure sur mon court sejour a Vientiane, j'aurais eu l'occasion de "visiter" l'univers sordide de la prostitution locale. Comme simple temoin, pas comme consomateur hein ! Le type qui m'hebergeait ainsi qu'une chinoise et une quebequoise via le reseau Couchsurfing, nous emmena tour a tour dans 2 bars a putes avant de finir dans une boite de nuit du meme accabit. Je crois bien que je n'avais encore jamais vu autant de travelos de ma vie ! Plus de la moitie des "dames" en robe possedaient une pomme d'adam, j'avais l'impression d'etre dans un reportage racoleur de TF1 genre "le droit de savoir" !

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